Depuis trois ans et demi, nous suivons un vendeur qui travaille un jour par semaine dans un shop de vape d’une petite ville de Bretagne. Voici ses observations, anecdotes et méditations.
Une envie irrépressible
Parfois, c’est irrésistible : on est face à une personne que l’on a irrépressiblement envie d’envoyer promener. Eh bien, je vous le dis sans ambages, faites-vous plaisir ! Attention, néanmoins : le but ici est d’envoyer paître un client sans perdre votre travail. Ce qui implique que la direction a suffisamment confiance en vous pour se dire que, si vous avez fait ça, c’est que vous aviez de bonnes raisons.
Et le but, subséquemment, est d’envoyer se faire voir une personne qui le mérite et dont la perte ne sera pas énorme. Et il faut savoir faire preuve de jugement. Par exemple, envoyer promener un mineur qui souhaite arrêter de fumer, sincèrement, ce n’est pas malin. Un jour, il aura 18 ans et pourra accéder à ce formidable outil de sevrage tabagique qu’est la vape. En attendant, il s’est fait piéger par l’industrie du tabac, va dépenser tout son argent chez le buraliste, alors, soyez gentil avec lui, expliquez-lui que vous n’avez pas le droit, et que vous le regrettez, parce que sa démarche est louable. Mine de rien, vous lui aurez donné une leçon de vie bien plus importante que si vous lui aviez juste dit “Ouste chenapan !”.
Et il y a le client qui ne comprend rien, ça fait des années que vous lui expliquez, mais il ne comprend rien, tout simplement parce que… comment dire gentiment ? Il est limité. Oui, mais pas assez limité pour ne pas comprendre que la clope le tue à petit feu. Et il fait l’effort. Donc, même si on en a envie après lui avoir changé pour la cinquantième fois sa résistance, on tient bon. Personne n’a jamais dit que conseiller en vape était un boulot facile.
Rabat-joie ?
Mais du coup, qui envoie-t-on se faire voir ailleurs ? Plein de monde. Tenez, pas plus tard que l’autre jour, un gamin rentre dans la boutique. Mineur, déjà, je tique. Il se dirige directement vers moi et me demande : “Vous vendez des puffs ?”
Là, vous avez compris : évidemment, on peut l’envoyer se faire lanlaire, ce morveux. Je me tourne donc vers lui, et lui dis, gentiment et posément : “Ah non, désolé, on est une boutique de vape, ici. Essayez chez JouéClub, peut-être ?”
Sinon, il y a le client qui achète sur Internet parce que c’est moins cher et vient ensuite se faire expliquer chez vous comment ça marche, en vous parlant comme si vous deviez vous sentir honoré qu’il daigne s’adresser à vous. Lui, c’est pareil : faites-vous plaisir. Et envoyez vos meilleures piques à la rédaction, qui sait ? On en fera peut-être une chronique des shops ?