Depuis trois ans, nous suivons un vendeur qui travaille un jour par semaine dans un shop de vape d’une petite ville de Bretagne. Voici ses observations, anecdotes et méditations.

C’est de saison

La vape saisonnière, ça n’existe pas. C’est du moins la conclusion que j’ai tirée de ces dernières semaines au magasin. Cette année, un automne annonçant fort et clair l’hiver a en effet succédé à l’été, quasiment sans transition. Autant, en plein mois d’août, je n’étais pas surpris de voir mes clients en tee-shirt et bermuda venir acquérir force fruités frais. Autant ces saveurs exotiques glacées me semblent incongrues tandis que, bien tranquilles à la maison, m’attendent des châtaignes prêtes à être grillées.

Et ces clients aussi constants que déterminés le sont en tout : toujours le même type de vape, toujours le même liquide, et ce, depuis parfois des années, depuis leur arrêt total de la cigarette combustible. Dont un, lorsqu’il apprit que nous allions cesser de vendre le kit sur lequel il vapait depuis 2013, nous avait acheté tout le stock.

Et à côté de ça, nous avons les passionnés de vape. Clearomiseurs puissants, reconstructibles, la difficulté avec eux est tout autre : leur proposer d’une semaine sur l’autre un liquide qu’ils n’ont jamais vapé.

Vape et raclette

Sauf qu’eux non plus ne vont pas changer d’un iota leurs habitudes, à de très rares exceptions près. Fruité frais l’été, fruité frais l’hiver. Gourmands onctueux l’hiver, gourmands onctueux l’été.

Pourtant, aucun de nos clients ne nous parle jamais de ses soirées raclettes en juillet, ni de ses barbecues en décembre. Sauf ceux qui partent en vacances dans des pays chauds, mais ça ne compte pas.

L’observateur averti m’objectera que chacun s’alimente avec des produits de saison, sauf que, d’une part, il n’y a plus de saisons pour les fruits et légumes, surtout depuis que la culture sous serre et le transport maritime se sont répandus dans le monde, et que rien, absolument rien, n’empêche de fabriquer des merguez en décembre et du fromage en août. Ce ne sont pas les vacanciers qui reviennent de Savoie le coffre rempli de tomme qui me contrediront.

La vape serait-elle la preuve que la saisonnalité gustative n’est qu’un effet d’opportunité et que nos envies ne sont en aucun cas guidées par la conjoncture climatique ? Je n’en ai aucune idée. Messieurs les sociologues, tirez les premiers.